AGOA (African Growth and Opportunity Act)

La décision du gouvernement américain de retirer le Cameroun dès janvier 2020 de la liste des pays africains bénéficiaires de l’AGOA (African Growth and Opportunity Act) aura-t-elle un impact significatif sur l’économie camerounaise ? 

Rappelons, pour commencer, que l’AGOA est une loi qui, depuis 2000, permet à des marchandises en provenance d’une quarantaine de pays africains d’avoir un accès préférentiel au marché américain ; notamment à travers une exemption des droits de douane. 



Ce décor étant planté, voyons la réalité des chiffres. 



D’après l’ambassade des États-Unis à Yaoundé, le Cameroun a exporté en 2018 vers le pays de l’Oncle Sam des marchandises pour une valeur totale de 220 millions de dollars, soit 131,11 milliards de FCFA. La même source ajoute que dans ce volume global, les exportations effectuées au titre de l’AGOA ne se sont élevées qu’à 63 millions de dollars, soit 37,5 milliards de FCFA. 



Ce qui représente seulement 28,6% du total des exportations du Cameroun vers les États-Unis. Sur la base de ces données, l’on peut affirmer sans grand risque de se tromper que suspendre le Cameroun des bénéfices de l’AGOA n’aura pas un grand impact sur ses échanges avec les États-Unis et, plus généralement, sur l’économie du pays. 



Soit ! Mais, la question fondamentale est de savoir si le Cameroun a jamais réellement tiré profit des opportunités qu’offre l’AGOA. De manière schématique, ce mécanisme qui est en vigueur jusqu’en 2025 après avoir été prorogé en 2015, pourrait par exemple permettre au pays de gagner ce qu’il perd dans les Accords de partenariat économique (APE) avec les pays membres de l’Union européenne. Des APE qui se situent à l’exact opposé de l’AGOA dans la mesure où ils dispensent du droit de douane un grand nombre de marchandises européennes vendues sur le marché camerounais ; privant ipso facto les caisses de l’État d’importantes recettes... 



Vue sous cet angle, la décision de l’administration Trump devient tout à coup une source de préoccupation. Car, même s’il n’en tire pas vraiment avantage pour l’instant, rien n’empêche l’État camerounais, dont les finances sont de plus en plus tendues, de revoir de fond en comble sa stratégie économique et commerciale afin d’exploiter la moindre opportunité disponible. Certes, les États-Unis ne figurent pour l’heure qu’à la 12ème position sur la liste des principaux clients du Cameroun en 2018 dressée par l’Institut national de la statistique (INS) ; mais, peut- être qu’en exploitant à fond les avantages de l’AGOA, ce classement pourrait être considérablement amélioré, pour le bien de l’économie nationale. Dès lors, la décision de Washington mérite d’être prise très au sérieux à Yaoundé.

Par Irène KALJOP ABENA

DIRECTEUR DE LA PUBLICATION